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matemonculot
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28 juillet 2008

L'Image, Faucheuse des femmes, momifiées ou dépouillées : à quand la résurrection ?

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(My kind of Burka, Lars Raun)

Le Conseil d'Etat a récemment refusé à une femme la possibilité d'une naturalisation car elle portait la burka-vêtement qui ne laisse entrevoir que les yeux de la tentatrice et qui de ce fait porte atteinte au principe d'égalité entre les femmes et les hommes. Il ne fait pas de doute qu'aujourd'hui la parité des sexes est établie au niveau institutionnel et légal. Cependant s'il ne fallait s'en tenir qu'à ce constat, notre réflexion n'aurait guère plus d'utilité concrète.

Plus clairement, il faudrait pénaliser ce qui constitue chaque jour un véritable obstacle au cours des vingt quatre heures de la vie d'une femme.

J'entends par là mettre un frein au pouvoir de l'image. Car en effet chaque seconde passée dans la rue, chaque minute  devant la couverture d'un magazine , chaque heure devant notre écran, détermine la fonction sociologique de la femme.

Je cite la publicité Babette que tous peuvent observer sur les murs de sa station de métro : "Babette accompagne les gros poissons plein d'oseille". Constat cynique, tournure ironique ou simplement blague à part me direz vous. Seulement c'est sans compter le pouvoir terrible dont dispose l'image sur notre inconscient collectif.

Et je n'ai pas inventé la lune en balançant ça et là quelques banalités grotesques, mais ce qui est banal doit également être dénoncé, devenant sinon une excuse propice à toutes les monstruosités.

Pour inciter à acheter des maillots de bain aux Galeries Lafayette, la marque nous impose à tous l'image d'une femme grand format, allongée sur un plongeoir. Elle est heureuse, fière d'exhiber ses interminables jambes au bout desquelles pend négligemment une petite culotte. Elle affiche un bronzage d'une perfection telle, qu'elle en presse ses seins d'une rondeur exquise. L'ovale parfait de son visage de nymphe tourné vers le public, elle exprime sa jouissance. "Acheter des maillots de bain pour mieux les ôter" semble-t-elle nous commander. Le monstre est nu et offre son sexe à un public imaginaire. Cette publicité s'adresse à la gente masculine car il est encore trop ancré dans les esprits l'idée que la femme n'a qu'une seule fonction : séduire l'homme, qu'un seul moyen de survie : être entretenue par lui.

Une fois de plus une liberté nouvelle s'est transformée en instrument de plaisir visuel pour l'homme et de torture pour la femme. Celle-ci se trouvant d'autant plus humiliée qu'elle est quotidiennement confrontée à une ambiguïté gênante difficile à gérer si elle veut se montrer efficace auprès de la gente masculine. En effet la nouvelle tendance des magazines féminins est d'afficher de façon outrageuse et ostentatoire d'innombrables photographies de femmes à poil dont le corps est sculpté à coups de logiciels ultra performants et d'inscrire en marge "Pourquoi les hommes aiment les kilos en trop". On exige constamment de la femme qu'elle ait un corps malléable au gré des regards. Une femme doit être suffisamment maigre pour porter les dernières créations fashion, suffisamment mince pour éveiller chez l'homme dont elle tient le bras lors des soirées mondaines un sentiment intense de fierté, suffisamment ronde pour éveiller le désir de ce même homme, tout content qu'il est d'avoir su ramener sous sa couette une belle plante féconde.

S'ensuit de ces exigences paradoxales, presque oxymoriennes, une véritable mutilation du corps car- je cite Jean Baudrillard - "dans la panoplie de la consommation, il est un objet plus beau, plus précieux, plus éclatant que tous, plus lourd de connotations encore que l'automobile et qui pourtant les résume tous: c'est le corps".

Le corps de la femme est sans cesse objectivé. Il est objet de désir. Mais cela peut être aussi un accessoire de luxe dont la fonction est de déterminer le rang social de l'homme. Une catégorie de femmes le savent et s' y soumettent davantage, croyant partager le pouvoir mais n'étant en réalité que plus esclaves. Pourquoi chacune d'entre nous ne décide-elle pas de déterminer seule sa grandeur sociale ?

Il est scandaleux qu'en 2008 existent encore des rapports grégaires entre les deux sexes.

D'où ce dilemme : cacher ou exhiber le corps de la femme ? Mais cette question ne fait qu'en précéder une autre: pourquoi le corps de la femme est-il lui-même un instrument, une chose docile et manipulable qui fait que les femmes ont une indentité amoindrie ? Elles ne sont pas en mesure d'imposer leur Moi dans une unité pleine et entière. Elles ne sont jamais rien d'autre que femmes et strictement femmes.

Elles sont femmes fatales lorqu'elles adoptent une robe de soirée, garces allumeuses en minijupe, femmes vertueuses lorsqu'elles s'encombrent du voile, veuves esseulées quand elles se couvrent de noir ou séductrices effrontées et boulimiques de sexe, apparaissant nues sur panneaux géants pour vanter les mérites des maillots Galeries Lafayette.

Le rapport au corps de l'homme est vécu de manière beaucoup moins traumatisante. Les publicités pour parfums ou caleçons pour homme ne révèlent aucune ambiguïté : le corps est beau, musclé mais jamais dans une posture humiliante, une mise en scène dégradante. On y voit que le tissu est de bonne qualité. Les publicités affichant des femmes font plus que vanter les mérites des produits, elles rappellent les devoirs sociologiques de celle-ci: elle est docile, soumise. Nue sur un plongeoir, la femme est offerte comme sur un plateau à l'appétit de l'homme, la langue tirée en mangeant une glace Miko, elle est là pour promouvoir ses qualités de suceuse, avec une crème fraîche Bridelight dans la main, on rappelle que c'est dans la cuisine qu'elle a sa place.

L'instrumentation du corps de la femme par le biais de l'image est inhérent à la société occidentale et au mécanisme du plaisir masculin : la vue.

Le foulard, la burka sont une autre forme d'instrumentation pour montrer chaque jour que la femme est une vulgaire tentatrice. Que c'est à elle seule de prévenir les ardeurs masculines. Si elle est trop audacieuse pour estimer que c'est à l'homme de réfrener ses pulsions, elle doit être violée car coupable. Elle doit être cachée car elle porte sur son corps les marques du péché.

Deux civilisations, deux formes de mutilation. Mais un seul aspect demeure, communément à ces deux mondes.

En Occident la femme pèche. Car le corps est exhibé. C'est donc une salope. Une masse de publicités affichent des bouches féminines avalant, ingurgitant goûlument des glaces, bijoux, diamants et autres. C'est bien que masse de filles demandent à avaler de grosses verges, non ? Pour ressentir l'impact de ce formatage subtil, il vous suffit un matin de vous sentir belle et confiante, d'enfiler une jolie robe, des talons qui galbent vos mollets, de sortir dans la rue et de constater.

En Orient la femme pèche. C'est dans sa nature. Mais on la réfrène avant même qu'elle ne passe à l'acte. Les hommes eux sont totalement irresponsables. Les jambes et le vagin de l'épouse ne lui appartiennent pas mais sont à son mari. Celui-ci est maître de son pénis, le nombre de femmes qu'il souhaite s'enfiler ne tient qu'à lui.

Le corps de la femme n'est pas à elle. C'est à l'homme, à la société de déterminer l'utilisation de ce corps: instrument de plaisir ou signe de vertu.

Un article du dernier Elle présente là encore le corps de la femme comme source du péché. Angelina Jolie est une voleuse d'hommes. Cet homme en question est resté purement passif, il n'a juste pas pu -le pauvre- résister au corps sublime de la vipère qui est selon le magazine dotée du "tiercé gagnant" : "belle, maigre et humble".

L'homme est en symbiose totale avec son corps, il l'écoute: il a faim alors il mange, il veut boire alors il trinque, il a envie de se soulager, alors beau-parleur il séduit ou timoré, il va aux bois . Le corps de la femme est soumis à ces exigences infernales: ferme pour être sain, maigre pour être tendance, voilé pour être pur, perforé pour être hype, excisé pour être destiné.

Trop déshabillée la femme n'est pas respectable, trop cachée elle est ringarde.

Notre corps est malléable. Nous sommes monstrueuses.

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Commentaires
L
Je hais cette pub pour les Galeries (et pourtant Dieu sait que je suis une fervente cliente) !! Le photoshopage a ses limites : on lui a tellement allongé les jambes qu'on dirait une sauterelle... et y en a encore pour croire que ça existe vraiment des corps pareils... et puis évidemment d'un côté il y a Laetitia Casta complètement retouchée et de l'autre Beigbeder qui n'est quand même pas un sex symbol : soit le corps est un objet et dans ces cas-là je veux un bel éphèbe soit ce n'en est pas un et on prend l'équivalent féminin de Beigbeder !
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